Si l'impact des nuisances sonores sur la santé est connu depuis longtemps, l'ampleur de ce phénomène est largement minoré, voire totalement ignoré par les autorités.

La situation pourrait toutefois évoluer (enfin) dans le bon sens. En effet, les initiatives lancées par les citoyens et les associations se multiplient. Dans le domaine de la pollution de l'air, leurs actions ont permis des avancées significatives. Ainsi, en juillet 2020, le Conseil d'Etat a condamné le Gouvernement à une astreinte de 10 millions d'euros par semestre de retard pour le contraindre à agir dans 8 zones particulièrement touchées (source).

Aujourd'hui, la mobilisation porte aussi sur le bruit, devenu un véritable enjeu de santé publique. Le trafic routier est particulièrement ravageur. Chaque année, des milliers de vies pourraient pourtant être sauvées et des milliards d'euros économisés.

Le bruit tue plus que le tabac et la pollution de l'air

Selon un rapport publié par l'Ademe (agence de la transition écologique), le coût social du bruit est de 147,1 milliards d'euros.

Concrètement, cela signifie qu'il est beaucoup plus élevé que celui lié au tabac (120 milliards d'euros) et à la pollution atmosphérique (environ 100 milliards d'euros).  A l'image des campagnes pour aider les fumeurs à se débarrasser de leur dépendance à la cigarette, il y aurait donc un besoin urgent d'un "mois sans bruit" pour reposer nos oreilles...

D'ailleurs, tout le monde en fait l'expérience durant le premier confinement : une des rares sources de satisfaction durant cette période difficile a été le retour du silence.

Selon l'Ademe, les principales sources de nuisances sonores sont :

• les transports (66,5%), et principalement le bruit lié au trafic routier (54,8%) ;
• le voisinage (17,9%), avec tous les bruits causés par les particuliers (12%) tels que la musique ou la télévision trop fort, le jardinage, les cris... ;
• le milieu professionnel (14,2%).

La santé de 25 millions de personnes en danger

En France, le bruit détruit 950 000 années de vie en bonne santé...

Toutes les études menées depuis une dizaine d'années aboutissent au même constat : l'être humain ne s'habitue jamais au bruit.

Concrètement, cela signifie que dans un environnement bruyant :

• Vous allez subir un stress continu (17 millions de personnes seraient concernées par cette problématique), avec les conséquences que cela peut avoir sur la santé physique et psychique. Ex : hausse du rythme cardiaque, réduction des défenses immunitaires, augmentation de la tension artérielle...
• Vous ne pourrez pas profiter d'un sommeil de qualité, comme c'est le cas pour 4 millions de personnes.

A ces troubles, il faut en rajouter d'autres qui sont aussi directement imputables au bruit : les difficultés de concentration (1 million de jeunes sont concernés), les problèmes d'anxiété et de dépression (430 000 personnes prennent des médicaments), le diabète (50 000 personnes), l'obésité (1,4 million de personnes), les maladies cardiovasculaires (630 000 personnes)....

Si vous croyez supporter le bruit, vous faites erreur : il s'agit d'une illusion. Votre cerveau détourne simplement votre attention mais la gêne demeure. Par exemple, si le niveau sonore est élevé, vos nuits seront plus courtes et ponctuées de micro-réveils. Pourtant, vous n'en aurez pas forcément conscience... et le matin, vous serez persuadé d'avoir assez dormi.

Savez-vous aussi qu'à partir de 56 décibels de fond sonore, le risque d'infarctus du myocarde progresse de 30% à chaque fois que l'exposition sonore augmente de 10 décibels ? (source) Or, ce niveau sonore est très rapidement atteint. Une rue à fort trafic dépasse facilement 80 décibels, une salle de classe bruyante 70 décibels, un chien qui aboie en continu 90 décibels...(source)

 Il existe des solutions pour sortir de l'impasse

Laurianne Rossi, présidente du Conseil National du Bruit, préconise d'intégrer la question du bruit dans l'étude d'impact de chaque projet d'aménagement ou de de construction (source). Il faut également s'attaquer à la question de la rénovation phonique des logements existants.

Au niveau des transports, plusieurs dispositifs peuvent être mis en place. Parmi les solutions disponibles, il y a notamment la modification des revêtements routiers, la limitation de la vitesse ou le changement de la motorisation.

Autre piste intéressante : le contrôle technique obligatoire pour les scooters et les motos, actuellement suspendu. Il pourrait diminuer considérablement les nuisances que subissent les riverains.

Actuellement, des radars anti-bruit sont aussi à l'étude dans huit villes en France. Ils permettront de sanctionner les deux-roues qui ne respectent pas la loi.

L'avis de Mohamed de Ridphonic

Nous vivons dans un monde bruyant depuis la révolution industrielle. Or comme avec la pollution de l'air, les dégâts causés sur notre corps sont difficiles à percevoir immédiatement.

C'est pour cela que cette question est souvent laissée de côté. L'urgence n'apparait pas de façon flagrante, alors qu'elle est bien réelle.

Aujourd'hui, il est temps de prendre conscience de la pollution sonore et traiter le sujet au plus haut niveau de l'Etat.